lundi 15 décembre 2008

Françoise DOLTO, l'actualité d'une pensée

100 ans après la naissance de F. DOLTO, des centaines de professionnel-les de l'enfance se sont réuni-es à l'UNESCO, dans le cadre de la célébration du centenaire de la Déclaration des droits de l'homme et à l'occasion de la journée mondiale de la philosophie.

Participant 2 jours à ce colloque, j'ai pu retirer de ces moments exceptionnels des réflexions, des analyses sur les politiques publiques, enfance, famille, parentalité.
A l'heure où l'on parle de traquer les délinquants en couche-culottes, où la famille devient l'objet de tous les reproches, où le gouvernement met en place le contrôle psycho-social des familles et la judiciarisation de la psychiatrie, il était bon de s'entendre rappeler quelques saines vérités :
- le vivant est tout sauf programmé comme un ordinateur, et il n'y a pas de déterminisme de l'évolution : des rencontres, des événements peuvent tout faire basculer
- la parentalité est un processus
- il faut accompagner, protéger l'enfant
- il doit y avoir un partage solidaire des expériences entre les parents, les enfants.

Alors ! Parlons des difficultés des familles avant de parler des familles en difficultés. Voyons la réalité en face : la famille a évolué, s'est adaptée, les rôles des femmes et des hommes ont évolué, et c'est pas la faute à Dolto !
D'ailleurs, cette évolution, est-ce un mal ?
Oui disent les réactionnaires de tout poil qui glorifient un âge d'or imaginaire où l'ordre régnait et nous tiennent des raisonnements dangereux pour l'humanité :
l'être est programmé, il faut traquer les mauvais gênes, les séquences génétiques, et offrir l'illusion scientifique qui peut mener à tous les désastres..... plus de capacités d'adaptation, aucune marge de liberté. C'est le déterminisme absolu, la prédiction.
Et nous voilà avec des bébés pré-délinquants, des enfants à dresser, des mineurs à redresser ....

Or, durant ce colloque, une bouffée d'air frais a soufflé : les intervenant-es ont rappelé leur conception du sujet faite de respect et d'humanité, bref, une autre éthique ! En illustrant leurs propos par des récits de psychanalyses d'enfants, l'importance d'écouter les faiblesses pour donner les capacités d'agir a été mise en évidence.
Et si la grande découverte de Freud fut celle de l'inconscient, celle de F. DOLTO a été de ré-inventer la psychanalyse d'enfants en France, en introduisant les dessins, la pâte à modeler, et surtout la parole de l'enfant.
De la nécessité de l'écoute des fragilités aux politiques familiales, il n'y avait qu'un pas : la parentalité est aujourd'hui une question sociale, quantifiable, et une priorité politique.
Agir, cibler les groupes les plus défavorisés " les pauvres, les familles monoparentales", définis comme des lieux de reproduction intergénérationnelle de la pauvreté et de la violence. Dépister très tôt, évaluer, agir vite ! D'où les pressions sur les familles à qui la société refuse la moindre défaillance parentale, la moindre défaillance de l'enfant.
"Parent incompétent ! Bébé incompétent ! C'était inscrit !"
Les sommets de la non-pensée sont atteints .... et la vitalité de la pensée de F. DOLTO est apparue comme un contre-poison.
L'idéologie dominante veut réduire le sujet à des comportements ?
La psychanalyse, fondée sur une éthique, va à contre-courant des grilles d'évaluation, des données statistiques, des normes que la société voudrait imposer.

Oui, la psychanalyse occupe une place subversive.
L'engagement des psychanalystes dans la cité est à l'ordre du jour. Car l'actualité de la pensée de F.Dolto vient de ce que son savoir n'est pas au service du contrôle social.

Défenseurs de " la cause des enfants", les intervenant-es ont démonté les contre-vérités sur lesquelles le gouvernement s'appuie pour mettre en place une société du contrôle social, une société en voie de déshumanisation.
Leur appel à une résistance éclairée a été entendu par les professionnel-les de l'enfance.
Les psychanalystes n'ont pas fini de nous étonner .....

http://www.pasde0deconduite.ras.eu.org/