Un vote historique sur lequel je reviendrai.
La veille, Mediapart a publié mon article destiné à convaincre des opposants à cette loi qui m'avaient interpellée.
François, Sylvain, Jean-Jacques, Stéphane, Jean-Paul, l'émancipation ne peut s’accommoder du système prostitutionnel.
Vous m’avez interpellée dans les débats concernant la prostitution. Je vous remercie pour la sincérité de vos questionnements. Je vous devais de vous répondre. Je le fais publiquement, car je sais que nombre de personnes s’interrogent sur le sujet.
La prostitution, un espace confiné, dédié aux violences
Nous sommes,
vous et moi, défenseur-es de l’égalité, comme d’autres furent en leur temps abolitionnistes
contre l’esclavage. Un homme en vaut bien un autre, quelle que soit sa couleur
de peau. Aujourd’hui il s’agit de dire :
-
une
femme vaut bien un homme. L’assigner à un rôle de dominée au prétexte qu’elle
est femme, est bien archaïque.
-
Un
homme, vaut bien un autre homme, et l’assigner à un rôle de dominé au prétexte
qu’il est gay ou trans, est bien archaïque aussi.
On ne peut
réduire la prostitution à une question de misère économique : il s’agit
d’un contrat où l’acheteur (99% des acheteurs sont des hommes), use voire abuse
de son pouvoir financier sur la personne prostituée. C’est dans ces situations
d’inégalité, dans le huis clos « des chambres », là où les
prostitué-es sont à la merci des acheteurs, que s’exercent les violences, que
le contact ait été noué sur internet ou dans la rue. La violence physique et psychique est le
corollaire de l’acte sexuel acheté. Les témoignages des personnes prostituées
et des médecins en attestent.
Misère et pornographie, justifications de la prostitution ?
« Tous
les clients ne sont pas de mauvais bougres. Les prostituées jouent un rôle
social face à la misère aggravée par le déferlement de la pornographie »,
me dites-vous.
Effectivement,
l’industrie du sexe via la pornographie, tente d’imposer des normes extrêmement
violentes et inégalitaires dans les rapports et les relations sexuelles entre
les hommes et les femmes. Elle véhicule l’idée faussement scientifique que les
hommes seraient naturellement dans une sexualité plus pulsionnelle et
irrépressible que les femmes. Il est d’autant plus urgent de renforcer l’éducation
à la sexualité et à l’égalité dans l’Education. La loi proposée au vote de
l’Assemblée comprend aussi un volet éducatif.
Quant à la
misère affective ou sexuelle que les personnes prostituées permettraient de
soulager, pensez-vous sincèrement que quelques minutes de sexe résolvent leurs
problèmes ? Par contre, depuis que
le débat s’est ouvert, nous savons que 80% des prostituées sont d’origine
étrangère, victimes d’un esclavagisme sexuel, amenées en France par les réseaux
de trafic d’êtres humains qui souvent leur confisquent leurs gains. Avoir
recours à ces personnes prostituées c’est être complice des réseaux et
contribuer à leur prospérité. A cette complicité, la loi répondra responsabilisation-pénalisation
de l’acheteur. Nous qui voulons lutter contre l’argent sale, nous qui prônons
la responsabilité individuelle comment pouvons-nous être contre cette démarche
?
Quelle législation pour lutter contre le trafic d’êtres humains ?
Les pays qui
ont choisi la voie prohibitionniste comme la Russie ont mis le marché de la
prostitution dans les mains des mafias, ce qui ne nous surprend pas.
Les pays
comme l’Allemagne qui ont choisi de règlementer les métiers de la prostitution
s’aperçoivent que les réseaux ont investi dans les Eros Center. Pire, alors que
l’objectif de l’Allemagne était de
protéger les prostituées, seulement 44
« travailleuses du sexe » ont recours à des droits sociaux. Les
problèmes sanitaires ont augmenté en raison de la toute puissance des désirs
des acheteurs, décuplés par l’accroissement du nombre de prostituées qui atteindraient les
400 000 personnes, principalement d’origine étrangère.
La France,
si la proposition de loi est adoptée, choisira la voie abolitionniste. S’attaquer
au marché en tarissant la demande : responsabilisation-pénalisation de
l’acheteur d’acte sexuel et dépénalisation du délit de racolage, éducation à
l’égalité, aides des personnes
prostituées à l’accès aux soins, accompagnement dans un parcours de sortie du
système prostitutionnel.
La Suède, symbole la libération sexuelle, a
choisi en 1999 la voie abolitionniste. Aujourd’hui, les réseaux s’en sont pour
la plupart détournés.
François, Sylvain, Jean-Jacques, Stéphane,
Jean-Paul, faites voter pour l’abolition !